mardi 30 août 2011

Ressorts d’engagement et interventions tutorales sur le plan motivationnel. Par Jacques Rodet


Ressorts d’engagement et interventions tutorales sur le plan motivationnel : quelques remarques sur les jeux sérieux et pistes de réflexion sur les mondes virtuels.


Christelle Mariais, Florence Michau, Jean-Philippe Pernin, Nadine Mandran dans leur récente publication intitulée « Learning Role-Playing Games » : méthodologie et formalisme de description pour l’assistance à la conception » proposent une méthodologie de conception de « Learning Role-Playing Game » (LRPG), basée sur l’explicitation des ressorts de jeu et la réutilisation de scénarios.

Les 7 ressorts d’engagement dans un jeu qu’ils identifient en s’appuyant initialement sur les 4 proposés par Caillois en 1958 dans « Les jeux et les hommes » sont les suivants :

• être en compétition
• être soumis au hasard
• jouer un rôle
• perdre le contrôle
• relever un défi individuel
• être reconnu
• agir collectivement

Je ne souhaite pas ici, décrire plus avant leur méthode qui est exposée de manière très claire dans leur article. Il suffit de préciser que cette méthodologie s’adresse aux concepteurs. Notons que de par leurs fonctions, il échoit à ces derniers de concevoir également les activités de support à l’apprentissage sur tel ou tel plan (cognitif, motivationnel, socio-affectif et métacognitif), et donc de prévoir les interventions tutorales dont les joueurs-apprenants sont susceptibles de bénéficier. Je m’intéresse ci-dessous plus particulièrement à celles concernant le plan motivationnel.

Si les ressorts sont en eux-mêmes des éléments actifs sur la motivation des joueurs-apprenants, il semble utile néanmoins de prévoir certains scénarios tutoraux pouvant pallier l’inefficacité ou une efficacité amoindrie de tel ou tel ressort sur tel ou tel joueur-apprenant.

Il est probable que certains joueurs-apprenants ne soient pas motivés par une mise en compétition avec leurs pairs même sous couvert d’un jeu. De même, les individus qui ont une personnalité les amenant à être en situation de contrôler le plus possible leur environnement seront probablement rétifs aux jeux les soumettant au hasard et à la perte de contrôle. Afin de permettre à ces individus de comprendre et d’accepter l’intérêt et les conditions initiales du jeu, mais aussi parfois pour entériner leurs refus, il sera nécessaire de leur proposer de manière proactive, par l’intermédiaire d’un tuteur-médiateur, c’est-à-dire un tuteur humain et non pas seulement une ressource, un espace de dialogue, support à des actions relevant de la conduite du changement (identification des freins et des impacts, co-élaboration de solutions, communication et formation…).

Ceci me semble assez incontournable pour un parcours de formation entièrement constitué par un jeu mais plus encore dans le cas d’un dispositif hybride où le jeu ne correspond qu’à un module où une séquence du parcours de formation.

Il est à noter également que certains de ces ressorts ne peuvent être utilisés simultanément sans mettre l’apprenant face à des injonctions motivationnelles paradoxales. Il est par exemple, contradictoire d’encourager la collaboration tout en mettant les individus en compétition les uns avec les autres bien qu’il soit possible de mettre en compétition des équipes de joueurs-apprenants dont le fonctionnement interne est collaboratif. De la même manière les ressorts « jouer un rôle » et « être reconnu » sont en tension tout comme « être soumis au hasard » et « relever un défi individuel », donc déterminé. Certains ressorts s’excluant ou étant difficilement compatibles, le concepteur doit effectuer des choix. Ceux-ci, quels qu’ils soient, non aucune chance de convenir à tous les joueurs-apprenants potentiels. Il est donc fort probable que certains d’entre eux ne soient que médiocrement motivés par tel ou tel ressort privilégié. Dès lors, ce sont bien des interventions tutorales sur le plan motivationnel qui sont susceptibles de répondre aux besoins de ces personnes.

A travers ce billet, m’appuyant sur une et une seule des propositions de Christelle Mariais, Florence Michau, Jean-Philippe Pernin et Nadine Mandran, j’ai essayé de montrer que les ressorts d'engagement dans un jeu sérieux ne peuvent suffire à tous les joueurs-apprenants et que certaines interventions sont à mener par un tuteur.



Si comme le montre ce schéma ci-dessus de Jean-Paul Moiraud, le jeu sérieux et les mondes virtuels ne se confondent pas, ces auteurs nous montrent un chemin à parcourir consistant à identifier les ressorts d’engagement dans un dispositif de formation au sein d’un monde virtuel. A partir de cet inventaire, il serait possible d’examiner comment compléter ou combiner ces ressorts d’engagement par des interventions tutorales sur le plan motivationnel. Il est bien possible que Jean-Paul Moiraud ait déjà quelques réponses…

2 commentaires:

  1. Christelle Mariais1 septembre 2011 à 09:23

    Merci pour ce point de vue très intéressant sur nos travaux et auquel j'adhère tout à fait. Une nouvelle perspective d'approfondissement de ce sujet si riche !

    Christelle Mariais

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  2. Merci Christelle pour ce commentaire. Notre objectif sur ce blog est bien d'essayer d'approfondir, du moins de questionner ;-)

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