lundi 26 septembre 2011

L’innovation en formation est d’abord pédagogique et non technique. De l'ingénierie pédagogique dans les mondes virtuels. Par Jacques Rodet

L’innovation est toujours relative à une transgression de l’habituel. Toutefois, transgresser les «règles» sans les connaître et les maîtriser, revient à se donner l’assurance d’arriver à peu près à n’importe quoi. Ce constat est également valable pour l’innovation pédagogique. Ainsi, aménager des espaces de formation dans les mondes virtuels ne peut correspondre à la simple réalisation d’objets et de leur assemblage tout en ignorant les principes de l’ingénierie pédagogique. Sans intention pédagogique explicitée, l’environnement de formation, même immersif, ne peut se suffire à lui-même. C’est ce que nous confirme Jean-Paul Moiraud dans, son dernier billet rendant compte de ses visites de différents mondes virtuels centrés sur l’apprentissage, en relevant que : « Il y a, dans les mondes observés, un déficit de lisibilité pédagogique. La qualité des animations tend à estomper ce manque, si l'on se contente d'une observation de surface. » et en soulignant qu’ « Établir des articulations logiques entre les constructions technologiques et les enjeux pédagogiques semble nécessaire. » 

Penser l’ingénierie pédagogique 
Afin d’avancer dans notre réflexion, il me semble utile d’utiliser les modèles d’ingénierie pédagogique dans des champs voisins des mondes virtuels, à savoir les formations multi-médiatisées et offertes à distance. A cet égard, les propositions de Gilbert Paquette, enseignant-chercheur au LICEF de la Télé-université du Québec sont intéressantes à examiner. La méthode MISA et le langage MOT qui l’instrumente sont performantes mais certainement lourdes à mettre en œuvre, en particulier lorsque le parcours de formation n’est pas très long ou que sa pérennité ne constitue pas un objectif poursuivi par les concepteurs. Depuis de nombreuses années, j’utilise certains éléments de cette méthode pour concevoir des formations ou accompagner des organisations ayant des problématiques de formation à résoudre. Un des outils dont je me sers le plus souvent est un schéma de scénarisation de la conception, de la réalisation et de la diffusion d’un environnement d’apprentissage. 

L’ingénierie pédagogique d’un système d’apprentissage à distance

Les étapes chronologiques de cette ingénierie, i) Définir le problème de formation ; ii) Proposer une solution préliminaire ; iii) Concevoir l’architecture pédagogique ; iv) Concevoir les matériels et leur diffusion ; v) Réaliser et valider les matériels ; vi) Planifier la diffusion du système d’apprentissage, sont croisées avec quatre axes, celui des connaissances, l’axe pédagogique, l’axe médiatique et celui de diffusion. Au croisement de chaque étape et de chaque axe correspond un livrable à produire constituant un des éléments du devis de l’axe concerné. 

Tableau de la documentation à produire

Trop fréquemment, l’innovation en formation revient à investir uniquement l’axe médiatique d’où des dérives technicistes auxquelles participent les innovateurs se définissant volontiers comme geeks. Il y a pourtant deux écueils à éviter dès lors que l’on s’engage sur la voie de l’innovation. Le premier est d’estimer, et parfois de croire, que l’innovation abolit toutes les pratiques antérieures. Ceci est davantage le cas de la part de «nouveaux entrants», de personnes n’ayant pas d’expériences précédentes dans le domaine dans lequel ils innovent, qui, ignorant qu’ils ignorent, armés de leur «militantisme» ou de leur foi en la puissance magique de l’outil, bousculent, certes, les usages, mais ont peu de chances d’être pertinents. Le second écueil, éventuellement conséquence du premier, mais pas toujours, est d’innover pour innover. Les «nouveaux entrants» ne sont pas les seuls concernés. Au contraire, des professionnels éprouvés peuvent considérer l’innovation comme un nouvel Ouest dans lequel ils ne seraient plus contraints par les «règles» régissant les pratiques traditionnelles. Aller toujours plus loin, se saisir de toutes les nouveautés technologiques, gagner en liberté parce que l’on ose se transformer en pionnier sont des tentations suffisantes pour se soustraire aux contraintes des pratiques les plus éprouvées. Etre conscient de ces écueils permet de s’en prémunir largement et constitue un des buts de ce billet. 

Si j’ai évoqué ma pratique d’ingénierie pédagogique, c’est bien plus à titre d’illustration que de volonté prescriptive. Ma préconisation serait plutôt celle-ci : que chacun qui souhaite s’investir dans la formation en monde virtuel, le fasse après avoir mis au jour ses pratiques d’ingénierie pédagogique et ne renonce pas à s’en servir. 

Ingénierie tutorale, élément de l’ingénierie pédagogique 
Ce blog s’intéressant plus spécifiquement à une modalité pédagogique, à savoir le tutorat à distance, la préconisation générale pour l’ingénierie pédagogique se révèle également pertinente pour les questions de support à l’apprentissage. Il est à noter que l’ingénierie tutorale est un sous-ensemble de l’ingénierie pédagogique, que, par exemple, l’approche pédagogique choisie pour une formation, influera nettement les tâches et les résultats de l’ingénierie tutorale la concernant. 

Le rôle de l’avatuteur dans un monde virtuel est à penser, à concevoir et à planifier. Là encore, les pratiques éprouvées dans des formations à distance peuvent servir de guide, du moins dans un premier temps. J’ai déjà eu l’occasion de définir et de décrire l’ingénierie tutorale (Rodet, Jacques (2010). Propositions pour l’ingénierie tutorale. Revue Tutorales, n°7 .pdf). De même, sur ce blog, j’ai proposé une grille permettant tant de penser que de décrire les interventions tutorales (cf. billet). Je reproduis ci-dessous un billet s’intéressant à la modélisation de l’ingénierie tutorale. 



L'ingéniere tutorale comme toute ingénierie, a pour but la production de livrables issus des études effectuées. Ces livrables, dont les formes peuvent être variées, permettent de décrire précisément le système tutoral, le scénario tutoral et le plan de diffusion du tutorat.

Le système tutoral indique la stratégie tutorale de l'institution de formation et les valeurs auxquelles elle se rattache en matière de support à l'apprentissage en lien avec ses choix pédagogiques. Il permet d'identifier les moyens humains et matériel qui assurent des fonctions tutorales au sein d'un dispositif de formation à distance ou hybride. Il précise également les relations que ces différents acteurs entretiennent les uns avec les autres pour aboutir à une qualité, de services tutoraux offerts aux apprenants, la meilleure. 

Le scénario tutoral (cf. Le scénario tutoral, livrable de l'ingénierie tutorale) identifie, décrit et quantifie les différentes interventions tutorales prévues tout en précisant leurs modalités et les outils de communication qui les supportent. Ces interventions sont situées dans le scénario pédagogique de la formation à distance ou hybride. La charte tutorale, partie de ce livrable, notifie les droits et devoirs de l'institution, des tuteurs et des apprenants les uns envers les autres. Elle constitue un document de transition entre la phase de conception et celle de diffusion.

Le plan de diffusion du tutorat indique comment le système tutoral et le scénario tutoral sont orchestrés lors de la diffusion de la formation à distance ou hybride. Il prévoit en particulier comment les acteurs seront préparés à l'exercice de leurs fonctions tutorales, le dimensionnement des outils de suivi des actions tutorales et de leur évaluation, les conditions de viabilité économique du système tutoral.

Le monde virtuel, brique d’un parcours de formation 

Le monde virtuel doit-il être considéré comme l'environnement unique et suffisant d'un parcours de formation ? L'expérience des mondes virtuels me manque pour être pleinement affirmatif. Toutefois, je remarque qu'après le e-learning qui devait remplacer le présentiel, le serious game que certains tendent à présenter comme le stade ultime de la pédagogie, il y aurait une certaine naïveté, pour ne pas dire plus, à considérer les mondes virtuels comme le nouvel eldorado pédagogique. La plupart des dispositifs de formation ayant recours aux TICE, s'étant fixés de réels buts pédagogiques et non pas la seule amélioration de la communication des «détenteurs du savoir», optent pour des formules mixtes. En effet, les institutions offrant des parcours entièrement à distance sans rabattre sur la qualité sont rares. Il me fait plaisir d'en citer une qui a aussi été mon université formatrice : la Téluq (Télé-université du Québec).

La mixité, l'hybridation, le blended learning autorisent aujourd'hui des assemblages de modalités traduisant l'imagination innovatrice des concepteurs. Là encore, certains outils conceptuels sont utiles. La typologie Competice, malgré son ancienneté relative, reste toujours inspirante. Envisager le scénario pédagogique en fonction de la part et de la position des activités à distance peut facilement être transposé pour les mondes virtuels : quelle part, quelles positions des activités pédagogiques en situation immersive au sein du scénario général d'une formation ? 

Récemment, Sébastien Fraysse, bien connu pour ses entretiens avec les éditeurs de plateformes e-learning, a proposé une nouvelle matrice pour penser l'hybridation. reproduite ci-dessous. Nul doute, qu'elle pourra être également utile aux concepteurs envisageant d'investir les mondes virtuels (lire aussi les billets qui accompagnent la construction de cette matrice).



Conclusion provisoire
Innover pédagogiquement, y compris dans les mondes virtuels ne peut être le résultat de l'oubli des méthodes d'ingénierie pédagogique au profit d'une débauche de moyens technologiques. Dans ce billet, j'ai plus particulièrement attiré l'attention sur quelques méthodes d'ingénierie pédagogique et tutorale et sur des modèles permettant de penser l'hybridation des modalités. Chaque concepteur, en fonction de ses préférences et de son expérience choisit ses propres référents conceptuels. C'est très bien ainsi tant l'innovation réside bien plus dans les subjectivités mises à jour et donc explicitées que dans le suivisme entretenu par le buzz.

vendredi 23 septembre 2011

Technologie et pédagogie. Par Jean-Paul Moiraud


Je visite de nombreux mondes virtuels pour constituer mon matériel de recherche (1). Je suis en train de constituer une base de données de mondes qui me paraissent significatifs d'un point de vue pédagogique. Le secteur médical (2) est un  terrain d'observation privilégié pour les mondes virtuels de simulation, les usages ont nombreux . Le virtuel est adapté à la connexion entre les savoirs disciplinaires théoriques et la pratique, dans le monde médical (on peut retrouver cette invariance dans les sciences juridiques)

Les concepteurs des mondes médicaux ont atteint un niveau technologique d'excellence. J'ai visité des salles d'opérations, des blocs chirurgicaux, des salles d'odontologie, des nurseries, des salles d'urgence, des salles de radiologie (3) ... Il est possible de simuler un grand nombre de situations professionnelles. Les acteurs (avatarisés) peuvent  interagir avec d'autres acteurs (patient/médecin/assistant), avec des objets professionnels (cathéter, masque, lampe, table d'auscultation, moniteurs, fauteuils pro ...) dans un environnement reconstitué.

Design de simulation

En enlevant la chair disciplinaire de ces simulations, on voit s'esquisser le squelette d'un modèle technologique immersif de formation (à la fois très proche du serious game, il affirme en même temps sa singularité).

J'ai employé le terme technologique et pas encore le terme pédagogique en raison de constantes d'observations accumulées pendant mes séances immersives.

Il y a, dans les mondes observés, un déficit de lisibilité pédagogique. La qualité des animations tend à estomper ce manque, si l'on se contente d'une observation de surface. De façon générale, les concepteurs des mondes ont intégré l'idée qu'il faut aider à l'apprentissage par la manipulation. Pour mener à bien cet objectif ils ont conçu des HUD  [Head Up Display ou affichage tête haute] (4), des objets qui rendent interactives les situations pédagogiques (5). Par contre le modèle pédagogique, sous tendu, n'est jamais (ou très rarement) justifié, il est occulté par la prégnance de la dimension technologique 

J'émets l'hypothèse qu'il faut que les acteurs aient, à disposition, un espace de formation immersif intelligible à tous les niveaux. La marge de progression est à rechercher dans cette direction. Établir des articulations logiques entre les constructions technologiques et les enjeux pédagogiques semble nécessaire.

La posture d'observateur est inconfortable car l'immersion rend difficile la perception du lien existant (je suppose qu'il existe) entre les démarches construites IRL (in the real life) et les logiques immersives. Je me permets de citer, à titre d'illustration, Laurent Gout qui rédige une chronique de visite de la salle d'Urgence de l'Impérial College de Londres : " L'Imperial College of London, présent de longue date sur Second Life, dispose d'une zone pour des "ateliers virtuels" où les participants sont confrontés à un afflux massif de victimes graves dans un service d'urgences. C'est du moins ce que j'ai interprété de ce qu'il m'a été donné de voir, car vous l'imaginez bien, au milieu du mois d'Août les locaux étaient plutôt déserts" - Le billet cité. Laurent Gout met en évidence un paradoxe, un monde persistant avec un niveau d'information volatile.

On peut émettre quelques hypothèses sur cet asynchronisme entre l'ouverture de l'univers instrumental technologique  et le bricolage des constructions liées à la formation / tutorat (6)

  1. Les mondes virtuels sont encore dans la phase d'innovation pédagogique. Les constructions sont (assez souvent) le fait de créateurs polyvalents / geeks. L'ampleur du chantier (par essence chronophage) les pousse à travailler par priorité. Il semblerait donc souhaitable que la chaîne de formation s'organise en ayant comme fil conducteur une structure construite sur le principe de la division des tâches. Une sous représentation des pédagogues dans le dispositif est peut être une explication possible.
  2. Les concepteurs ont choisi d'expliquer, aux apprenants, aux enseignants, aux tuteurs, les enjeux IRL ou par blog interposé (7), le monde virtuel étant confiné à sa simple fonction instrumentale.
  3. Les concepteurs ne jugent pas utile de définir inworld les enjeux, parce qu'ils leurs semblent évidents, transparents. la construction technologique se suffisant par elle même.
  4. Les mondes visités ne sont que des constructions technologiques, les modèles pédagogiques ne sont pas intégrés.
  5. La communauté pédagogique dans les mondes virtuels n'est pas suffisamment organisée, les publications sont éparses et la mise en commun de modèles est quasi absente.


Technologie et pédagogie


Il ressort de ces observations, et quelque soit l'hypothèse évoquée ci-dessus, que les mondes virtuels sont encore trop orientés technologie et pas suffisamment sur les enjeux de formation, même si la direction est clairement affichée. 






C'est probablement à ce titre que Jacques Rodet peut apporter sa pierre à l'édifice en proposant une trame pour un modèle de tutorat immersif qui associe en subtilité technologie et tutorat.

NB : Mon propos se veut généraliste. J'ai visité des mondes et rencontré des acteurs qui sont des exceptions notoires. Ils œuvrent dans le sens de la scénarisation complète. Le monde Dental Life et le travail de Laurent Gout sont des exemples à suivre avec attention.



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(3) Site de dentiste sur Second life Hôpital sur Second Life Salle d'urgence sur Second Life
(4) le hud est une méthode par laquelle l'information est relayée graphiquement au joueur - Exemple de hud - Autre exemple de hud
(5) Simulation N° 1 - Simulation N°2 - Les simulations présentées n'ont pas été faites sous le contrôle d'un médecin, ce qui peut expliquer des approximations, voire des erreurs grossières d'un point de vue médical.
(6) En disant cela je ne dis pas que les objectifs pédagogiques sont absents, je constate que  leur lecture est brouillée.
(7) Imperial college London"The research teams have developed strong relationships with, industry, government organisations, healthcare providers, and educational institutions to facilitate the translation of its research into practical applications and new innovative technology." - "Major Incident Planning is a national requirement for NHS trusts and other emergency services, with frequent exercises to maintain skill levels, patient safety and preparedness. Field exercises and table top simulations are valuable training tools but have limitations. We set out to demonstrate the potential of disruptive virtual world technology to provide lower cost, direct access to simulated environments for many more staff. In this project we are developing and validating a virtual world exercise simulator, supported by funding from the Health Protection Agency."




jeudi 15 septembre 2011

Les expressions du visage de l'avatar

Tutorat et prise en compte de l'espace de formation. Par Jean-Paul Moiraud

Dans les dispositifs habituels de formation en ligne, la gestion tridimensionnelle de l'espace (numérique) est un élément peu pris en compte car il est de peu d'importance. L'enseignement, l'apprentissage et le tutorat s'exercent dans un repère plan. Les acteurs du dispositif sont éclatés sur le territoire et communiquent via le texte, le son, l'image et la vidéo. Les contraintes sont plus d'ordre temporel que spatial.

Un monde virtuel (notamment de simulation) bouscule cette organisation.  Il contraint les concepteurs des dispositifs à penser autrement le dispositif tutoral. Il faut considérer le 3D comme une variable du dispositif.

Jacques Rodet, dans un précédent billet, pose la question  de la pertinence de l'intervention tutotale pendant la phase d'apprentissage. Faut-il intervenir ex abrupto  ? Est ce pertinent ou est ce un frein ?

Le monde virtuel n'est pas soumis aux lois physiques de la pesanteur. C'est un atout pédagogique puisqu'il est loisible au tuteur de se positionner en dehors du champ formatif. Il peut observer en hauteur.  Il conviendra, dès lors, aux concepteurs de déterminer les strates spatiales de travail. Celles qui se situent entre le sol et l' espace aérien. Comment positionner l'apprenant et le tuteur ?

Les images ci-dessous sont conçues pour illustrer la problématique des cadres spatiaux de cette réflexion.


La position spatiale du tuteur (Images Laurent Gout)



Le tuteur exerce son activité au dessus de l'exercice de simulation. Il est en capacité d'observer et d'analyser l'activité du ou des apprenants sans perturber l'acte d'apprentissage et sans perturber par sa présence le travail des apprenants.

Rôles des acteurs et positions spatiales








On peut intégrer dans le dispositif de formation des observateurs spécialisés et des tuteurs. Ils seront placés en altitude et instrumenteront les fonctionnalités de l'image subjective et / ou de vue d'un objet pour visualiser la scène (1). Le tuteur pourra intervenir s'il le juge utile en descendant ponctuellement sur la scène de formation. On pourra parler de tuteur extra territorialisé




L'imperial college of London (simulation de médecine de catastrophe) a intégré cette dimension spatiale extra territorialisée. Les concepteurs ont  créé un toit transparent au dessus la salle d'urgence. Il est ainsi possible d'observer les acteurs en position haute, sans perturber le bon déroulement de la séance.


Dans d'autres dispositifs de formation, l'agencement spatial peut avoir une logique d'horizontalité. L'utilisation cumulée, de la fonctionnalité vue de l'objet et de la fonctionnalité vue subjective, permet de gérer visuellement la situation(1). On parlera du tuteur immergé.





Nous pouvons représenter l'espace de travail dans un monde virtuel sous cette forme volumique. La mise en place du dispositif tutoral devra intégrer en amont de la phase opérationnelle, une analyse des possibles. Cela ne signifie pas que toutes les phases interactives instrumenteront l'espace, mais il faudra déterminer les conditions de son implémentation lorsque cela s'avère nécessaire (2)

 

 

 

 

 

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Vidéo N° 1 L'instrumentation des commandes de visualisation de second life

Vidéo N° 2 -  Le tuteur et l'espace


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Le gestion horizontale de la situation de formation - Le tuteur immergé


mardi 13 septembre 2011

Le tuteur immergé

Le tuteur peut se placer en altitude ou s'intégrer dans la simulation. Dans la vidéo ci-dessous, on peut aisément imaginer le tuteur dans la salle d'audience (simulation de situations juridiques). Il utilisera les fonctionnalités de la vue subjective pour observer le déroulement de l'exercice.

Vidéo réalisée dans le palais de justice virtuel de Lyon, reconstitué par les enseignants de la faculté de droit virtuelle (FDV)

Configurations

Les grilles à remplir pour programmer sa navigation dans Francogrid, Osgrid  et second life (Avec imprudence)

NB : cliquez sur les images pour agrandir

Grille Francogrid
Grille Osgrid

Grille second life

Grille vierge à remplir et à valider

Pour les possesseurs de Mac, la configuration DNS nécessaire ici le wifi

Les DNS sur Mac - Mode wifi
ici sur Ethernet

Les DNS sur Mac Mode Ethernet

Module de paramétrage du son dans le navigateur de second life

Paramétrage du son

 Module de paramétrage du son dans le navigateur imprudence

Paramétrage du son


L'architecture du dispositif monde virtuel, lorsque les grilles sont paramétrées, a la forme suivante




lundi 12 septembre 2011

Vidéo - Observer et tutorer les apprenants en altitude

L’avatuteur en vol, posture à concevoir. Par Jacques Rodet

Dans les mondes virtuels, il existe une dimension qu’il est bon de ne pas négliger, c’est la verticale ! Si la possibilité de voler qui est offerte aux avatars est certainement une des plus ludiques, elle est aussi à envisager dans le cadre de nouveaux positionnements spaciaux de l’avatuteur pour ses interventions.

Ainsi que l’a montré Jean-Paul Moiraud (1), il peut être très avantageux pour un avatuteur de ne pas encombrer l’espace dans lequel des apprenants font évoluer leurs avatars. Ceci est plus particulièrement vrai lors d’expériences d’immersion complète (cas d'usage n°2 évoqué dans ce billet) dans lesquelles les apprenants doivent adopter des comportements pouvant être rapprochés d’un référentiel de bonnes pratiques (gestes prescrits comme par exemple la pose d’une perfusion). Lorsque les avatars des apprenants doivent entrer en interaction les uns avec les autres, y compris en interaction gestuelle, le fait que l’avatuteur n’encombre pas l’espace est encore plus primordial.

Il est donc nécessaire, lorsque l’on conçoit les interventions tutorales (cf. Grille de description d'une intervention tutorale)  de prendre en compte cette dimension verticale. L’avatuteur, planant au-dessus de la scène, grâce à la vue subjective (2), peut avoir une bonne vision des gestes et comportements des avatars des apprenants. Placé à une altitude raisonnable, il pourra, en cas de besoin, atterrir rapidement pour montrer aux apprenants le geste adéquat. Il est à noter que même planant, il peut s’adresser aux apprenants par le chat.

Ayant eu plusieurs fois l’occasion de regretter que dans un dispositif e-learning classique, l’apprenant ne soit pas toujours tenu au courant de l’examen que le tuteur effectue sur son évolution dans son parcours d’apprentissage, il me semble qu’il ne faut pas être moins exigeant dans les mondes virtuels. En conséquence de quoi, l’avatuteur planant ne devrait pas le faire à l’insu des apprenants. Au contraire, ceux-ci devraient être informés qu’ils sont observés par l’avatuteur en altitude. Dans les cas où la scène est envisagée comme épreuve d’évaluation, il me parait également opportun que la présence et la position de l’avatuteur soient connues des apprenants.

Ces éléments : présence de l’avatuteur, position dans l’espace, objectifs d’observation, résultats attendus de l’observation, interactions envisagées avec les avatars des apprenants, sont à ajouter dans les fiches descriptives des interventions tutorales lorsqu’elles sont effectuées au sein d'une formation se déroulant dans un monde virtuel. Il est envisageable d’imaginer que d’autres éléments, tels le vêtement utilisé par l’avatuteur, le répertoire de ses gestes puissent aussi faire l’objet de mentions lors de la conception des interventions tutorales.

(1) Vidéo « Le tuteur et l’espace » http://www.youtube.com/watch?v=EqGK6rkx4LE
(2) Album Facebook « vue subjective » http://goo.gl/1sil3

vendredi 9 septembre 2011

Première vidéo sur les gestes de l'avatuteur par Observer Teacher

Monde virtuel et motivation des apprenants. Quelques pistes. Par Jean-Paul Moiraud




Dans le billet intitulé "Ressorts d’engagement et interventions tutorales sur le plan motivationnel" Jacques Rodet m'interpelle de la façon suivante :

"A partir de cet inventaire, il serait possible d’examiner comment compléter ou combiner ces ressorts d’engagement par des interventions tutorales sur le plan motivationnel. Il est bien possible que Jean-Paul Moiraud ait déjà quelques réponses…"

Je préfère parler de pistes de réflexions avancées, plutôt que réponses. Commençons par  cadrer cette analyse en nous référant à la définition du plan de support motivationnel.  donnée par Jacques Rodet, dans un billet du  blog de T@D intitulé "Distinction entre support motivationnel et support socio-affectif des apprenants" : (extrait)

"Le motivationnel est un plan de support à l’apprentissage qui vise à encourager la persévérance à la formation et à prévenir l’abandon. Le tuteur, ne doit pas se limiter à intervenir comme aiguillon et relais des stratégies de motivation extrinsèque mais doit également agir de manière à ce que l’apprenant renforce sa motivation intrinsèque. Ceci est particulièrement nécessaire lorsque l’apprenant n’arrivant plus à faire face à ses difficultés d’apprentissage envisage l’abandon. Le tuteur ne devrait pas non plus être avare d’encouragements et de félicitations car le renvoi seul de l’apprenant à ces erreurs ou à ces échecs est profondément démotivant pour de nombreuses personnes." Source - Blog de T@D Jacques Rodet

Je propose de jalonner quelques pistes pour ébaucher un plan de support motivationnel en monde immersif. Elles n'ont pas de valeurs prescriptives, elles sont un champ des possibles, une première approche exploratoire.

 Les mondes virtuels émergent dans la formation à distance, les modalités du tutorat sont à définir. Il est préférable, dans un premier temps, de s'attacher à cerner prioritairement les usages plutôt que les enjeux manipulatoires  (même s'ils sont une source évidente de questionnement). C'est ce que souligne Christelle Mariais : "Concernant la conception d’un scénario au stade de l’esquisse, notre approche se focalise sur l’activité des apprenants, indépendamment des outils qui seront utilisés lors de l’exécution" Christelle Mariais, Florence Michau , Jean-Philippe Pernin, Nadine Mandran, in [« Learning Role-Playing Games » : méthodologie et formalisme de description pour l’assistance à la conception] (2011)

Je procèderai en deux temps, en parlant d'abord des ressorts d'engagement motivationnel pour les tuteurs, puis ceux des apprenants. Une construction qui pourrait s'apparenter à une ébauche de scénario à granularité fine.
  • Motiver le tuteur

L'apprenant et la chaine de formation
Je vais emprunter une voie de traverse en évoquant en premier la motivation du tuteur. 

Il est nécessaire de rappeler que le monde virtuel de formation n'a d'existence et de consistance que s'il est pensé dans le continuum d'une  chaine de formation. Le rôle du tuteur est spécifique. Motiver l'apprenant c'est comprendre les enjeux tutoraux immersifs et les fonctions adjacentes (schéma ci-contre).

La charge cognitive est forte dans un monde virtuel. Les tâches spécifiques des acteurs du dispositif doivent être distribuées. Un scénariste, un développeur, un concepteur de cours, un tuteur, un community manager, un capteur de ressources.  Les apprenants ne pourront être encadrés, écoutés, motivés que si le tuteur peut se concentrer sur l'aide aux apprenants en s'affranchissant des contraintes amont et aval (1).
  • Motiver l'apprenant
Après le détour nécessaire sur les rives du tutorat, il convient d'examiner quels sont les ressorts d'engagement pour les apprenants (le terme apprenant englobant les étudiants de la formation initiale et les salariés en formation tout au long de la vie ou life long learning). Je vais reprendre un extrait de l'article de Christelle Mariais, Florence Michau , Jean-Philippe Pernin et Nadine Mandran (op.cit.). Ils déterminent les quatre premiers ressorts d’engagement sous les termes de "agôn, alea, mimicry et ilinx" soit, traduit « être en compétition », « être soumis au hasard » « jouer un rôle » et « perdre le contrôle ». Le dernier ressort proche de  l'injonction  paradoxale, nous enjoint de trouver le point d'équilibre entre l'impératif  de faire  perdre le contrôle à l'apprenant et celle de le rassurer.

L'intervention tutorale immersive est spécifique. Elle est formalisée dans trois dimensions ; L'incarnation tridimentionnelle du tuteur,  l'instrumentation interactive de la gestuelle,  l'intervention dans un espace signifiant. Trois points d'ancrage pour les ressorts motivationnels.

- Une représentation 3D du tuteur


Avatar Robot

Avatar humanoïde
-La structure des mondes virtuels permet au tuteur d'interagir non seulement par la voix, le texte, l'image, la vidéo mais aussi grâce à son avatar. Dans un dispositif habituel, type classe virtuelle, l'apprenant doit se représenter le tuteur par construction d'une image mentale (on suppose que la webcam est désactivée). En monde immersif le tuteur est représenté sous une forme "avatarisée", charge à son détenteur, de lui conférer une sociabilité. Choisir une représentation humaine ou robotisée n'a pas le même sens. Le tuteur projette une part de lui même dans sa représentation numérique.
L'avatar du monde virtuel est représenté en 3D et évolue dans un espace 3D. Il peut se mouvoir, interagir avec les autres acteurs. Le tuteur pourra ainsi rencontrer l'apprenant dans l'espace de formation. Il pourra instaurer un lien de proximité effectif par la combinaison fine, des déplacements spatiaux, de la voix et du texte et de la gestuelle.

- Instrumenter la gestuelle de l'avatar

Les possibles technologiques de la programmation permettent d'intégrer une gestuelle humaine, une attitude. Par attitude nous entendons "une attitude est un état mental de préparation à l’action qui exerce une influence dynamique sur nos comportements. C’est en somme une manière de se comporter ou une prédisposition à porter un jugement, à manifester un comportement dans une situation donnée." Allport (1935) "In Quelques repères pour évaluer les attitudes et les comportements professionnels en soins infirmiers" - Margot Phaneuf, inf., Ph. D. Infiressources, août 2010.

Il y a ici un champ de réflexion sur la place du geste et de l'attitude dans un dispositif immersif  et sa possible instrumentation. L'aide, la motivation, l'acte qui consiste à rassurer l'apprenant lorsque cela s'avère nécessaire peut être augmentée grâce au geste . Le geste chaleureux, le geste d'encouragement (nécessité de concevoir des simulations spécifiques mais avec une finesse du geste et/ou de l'attitude) sont à intégrer comme élément de réflexion du scénario. Le geste est -il à l'heure actuelle un élément pertinent pour structurer les aspects motivationnels ? La mise en forme d'un document définissant ce qu'est le geste professionnel du tuteur pourrait être une ressource précieuse pour donner une réponse. Son prolongement pouvant être des travaux de "programmation" pour les transformer en geste numérique adapté au tutorat.

- Agir dans un espace signifiant

Le lieu de formation immersif doit se comprendre comme un espace normé. Il n'est pas le bureau du tuteur, il n'est pas le domicile de l'apprenant. Il est un lieu réel d'interaction pour l'apprentissage, l'enseignement et le tutorat.

Dans les dispositifs habituels de formation en ligne (classe virtuelle, visio-conférence ...) le tuteur accompagne via les chats, les forums, les wikis, le mail, la visio... En immersion il est bien sûr possible de dialoguer mais il est en plus loisible de  rencontrer le tuteur dans une unité d'espace et de temps. Le design du lieu doit contribuer à créer un sentiment d'identité et de confort spatial. Se rencontrer réellement en immersion (l'avatar étant utilisé comme médiateur) semble être une plus value pour répondre aux questions sensibles des apprenants comme la difficulté de compréhension, le risque de décrochage. Ajoutons que le dispositif immersif éloigne des bruits de fond numérique. Être dans un monde numérique de formation coupe des sollicitations extérieures qui construisent la culture du "zapping" (lire ses mails, consulter ses messages sur Facebook, surveiller ses tweets). L'immersion favorise le tutorat en permettant de se concentrer sur l'essentiel, évoquer ses difficultés de formation. En disant cela, j'élude volontairement la question de la difficulté pour l'apprenant d'identifier et d'exprimer ses difficultés, il s'agit là d'une autre question.


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Évoquer les interventions tutorales sur le plan motivationnel, même si l'on est dans un registre différent, c'est ouvrir la question du contexte socio-affectif immersif. L'approche en   monde virtuel nécessite des compétences manipulatoires fortes (maîtrise du navigateur, avatar, boite directionnelle, vue subjective, gestion de l'espace, des gestes ... Le technique conditionne ici l'acquisition des savoirs. A distance l'apprenant peut éprouver un sentiment de solitude technologique tout en étant en situation d'interaction sociale. 


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(1) Le recensement des usages que je suis en train d'effectuer me montre que les expériences sont encore largement le fait de passionnés. La chaîne de formation avec partage des compétences est à créer. Le monde virtuel semble faire l'objet d'observations institutionnelles mais les engagements ne sont pas encore au rendez- vous.








mercredi 7 septembre 2011

Communication non verbale dans les mondes virtuels : le résultat d’une intentionnalité au risque d’une signification typée ? Par Jacques Rodet

Le savoir-faire du tuteur à distance est d’ordre technologique et pédagogique mais il doit aussi beaucoup à son savoir-être. C’est parce qu’il comprend tout l’intérêt de se mettre en situation d’écoute de l’apprenant, en manifestant son empathie, en utilisant le questionnement ouvert, la reformulation et la réverbération que le tuteur à distance est en mesure de réaliser des interventions appropriées envers les apprenants. Dans des domaines professionnels où le geste est essentiel, le savoir-faire du tuteur est aussi assimilable à sa capacité à montrer, à se mettre en situation.

Dans les mondes virtuels, les gestes des avatars sont toujours le résultat d’une intention humaine, celle de celui qui pilote l’avatar et conjointement celle du programmeur qui a créé le script d’animation. Si pour la démonstration de postures professionnelles l’intentionnalité du geste est une nécessité, cela est tout différent lorsque la médiation entre le tuteur et l’apprenant porte sur les aspects socio-affectif, motivationnel, métacognitif ou même cognitif dès lors que le contenu de la formation est davantage conceptuel.

Dans le monde réel, le propos du tuteur est ponctué par sa communication non verbale. Il est à noter, que cette communication non verbale échappe très largement à son contrôle. Si d’aucuns s’intéressent à certaines techniques pour rendre plus congruentes leur parole et leur gestuelle, la plupart s’autorise la spontanéité de leurs expressions corporelles.


En formation à distance ne recourant pas à la vidéo, la communication non verbale est absente, si l’on veut bien admettre que le pouvoir d’évocation des smileys reste limité. Cette absence impose aux interlocuteur
s une attention plus soutenue à l’énonciation permettant le dévoilement d’énoncés non explicites.
l'avatar Rojajaro applaudit... s'applaudit ?...
Dans un monde virtuel, le tuteur peut imprimer des gestes à son avatar. Toutefois, outre le fait que les gestes sont en nombre limité, qu’il est nécessaire de procéder à de longues séances d’entrainement pour maitriser des enchainements de gestes ou des gestes plus subtils, que les expressions faciales sont souvent difficiles à percevoir et mériteraient de nouveaux progrès techniques, que la coordination du geste et de la parole est aussi liée à la qualité des débits informatiques, que la coordination du geste et du chat est opérationnellement quasi impossible, il existe un autre obstacle d’importance à la reproduction de la communication non verbale : elle n’existe que parce que le pilote de l’avatar la décide. Cette prise de décision la rend définitivement autre que dans le monde réel. Le geste qui survient dans le monde réel, et qui ainsi donne à voir du non visible, du non énoncé, ce geste est envisagé, soupesé, calculé dans le monde virtuel. S’il permet de souligner, d’illustrer, de renforcer le propos, sa signification semble plus typée, réduite, moins polysémique que celle des gestes qui nous échappent continuellement dans le monde réel.

Une fonction de visualisation de son avatar évoluant dans un environnement virtuel marque aussi une grande différence avec le monde réel sur le plan de la gestuelle. Il est en effet possible de voir de face son avatar, un peu comme si, dans le monde réel, tout en agissant, l’on se regardait en permanence dans un miroir. L’aspect narcissique de ceci serait intéressant à étudier mais je me limiterais à observer qu’il devient bien difficile sinon de s’oublier, du moins de mettre en retrait son avatar. La vision et la conscience des chaussures de son propre avatar, par exemple, est bien plus prégnante que celle qu’un formateur aura de ses souliers durant une animation de formation. Ainsi, un objet, l’avatar et les fonctions de mouvements qui lui sont associées, avatar qui est par nature une mise à distance de soi, ne nous amène-t-il pas à devenir plus soucieux de son apparence et de ses gestes ?

L’avatarisation condamne-t-elle à une communication non verbale instrumentalisée, intentionnalisée, à la signification typée ? Si c’était le cas, ce serait un inconvénient non négligeable pour certaines interventions tutorales dans des dispositifs de formation dédiés à des savoirs non procéduraux ou manuels (ceux-ci se prêtant bien à l’immersion dans la simulation). Il serait peut-être alors préférable, comme cela se fait dans certaines classes virtuelles où les participants arrêtent leur webcam pour se concentrer sur le son, de s’abstenir de communiquer par gestes et de préférer un avatar immobile, tel ceux que les habitués des mondes virtuels repèrent comme étant des novices.