mardi 26 juin 2012

Typologie et scénarios

Reprise d'un billet de blog et son application vidéo

L'analyse de Christophe est intéressante au sens où elle pose la question de la structure des mondes virtuels en fonction des besoins pédagogiques exprimés. On peut essayer, à partir de là, d'esquisser une typologie d'usages.
  • Le monde virtuel comme instrument de formation en ligne, un lieu immersif de reproduction du lieu de formation. Mes cours sont de ce type. Les besoins exprimés sont de l'ordre spatial et temporel, le monde virtuel permet de gérer les interactions humaines pour un groupe géographiquement éclaté. L'inconvénient de la dispersion des compétences peut être résolu via les réseaux. Ce blog regorge d'exemples et d'analyses sur ce point
  • Le monde virtuel comme instrument de simulation - Le monde virtuel est paramétré pour que les acteurs simulent des situations du réel "possibilité de recréer des situations exceptionnelles pour mettre en situation des gens face à des situations qu'ils rencontreront rarement" Laurent Gout (2011). Le monde ne se substitue pas à l'acquisition de routines dans la vraie vie mais il permet d'anticiper des situations atypiques sans conséquences effectives IRL. Le monde virtuel permet d'analyser des situations extra - ordinaires par un procédé de répétition et d'analyse par retour en arrière (voir vidéo N° 2). Le monde dentallife s'inscrit dans cette dynamique de simulation ainsi que la salle d'urgence de l'impérial college of London.
  • Le monde virtuel comme lieu d'immersion dans un élément de savoir, comme processus spécifique. Les acteurs sont immergés dans une représentation du savoir (exemple des champs magnétiques) et interagissent avec l'environnement. Il semble qu'il soit possible, à ce stade, de croiser les travaux de ceux qui œuvrent dans les mondes virtuels et ceux qui développent des systèmes 3D.
  • Le monde virtuel comme instrument de co-construction des savoirs - Dans certains domaines il est possible d'utiliser le monde virtuel comme lieu de construction de concepts. L'exemple de collaboration entre une université américaine et une université Égyptienne est un bon exemple :
"Visionaries like Dr. Amr Attia from Cairo’s Ain Shams University and California-based architect David Denton, have volunteered countless hours and joined forced with Kara Bartelt at the USC School of Architecture to organize this project, with modest support pledged from the United States Department of State to realize Obama’s ‘Kansas to Cairo’ vision – a project they first discussed at a panel hosted by the State Department last June (read more about this architectural panel held in Second Life on america.gov or watch video coverage here)." Source (Credit) Arch virtual

On dépasse le cadre classique du cours frontal immersif distant, ou l'immersion dans un concept immersif déjà construit pour entrer dans le domaine de la co-construction entre enseignants et apprenants. Le monde virtuel est LE lieu de création.
Je pense, mais cela reste à démontrer, que les modes de tutorat sont à adapter aux modes de représentations virtuelles. Jacques Rodet doit pouvoir répondre de façon savante à mon affirmation largement péremptoire à ce stade de l'analyse.
Cette première analyse n'est en rien exhaustive, je compte affiner le propos dans les mois à venir.

Simulation, réprésentation graphique épurée ou hyperréalisme ?



Minecraft (TM) - Les moutons dans les champs
Dans ce blog nous avons généralement appuyés nos propos à partir d'usages repérés dans les mondes 3D. Nous avons traités des questions du geste, de la parole, des déplacements, des interactions. J'ai depuis sa création  présenté dans des séminaires les résultats des premiers travaux, montré à mes fils gamers les captations vidéos de mes travaux. Une remarque récurrente est émise : "Le graphisme est moins bons que dans les jeux", je passe sous silence les remarques moins diplomatiques.


Les commentaires se fondent sur un aspect technique mais ils débordent largement ce cadre car ils engagent la mission du tuteur notamment sur son champ d'intervention cognitif.

A l'heure actuelle le risque est important de confusion des genres. Les jeunes générations, nourries aux jeux vidéos serons tentées de se focaliser sur l'aspect soigné du graphisme, de ne retenir que la jouabilité au détriment des enjeux pédagogiques.

Il est déterminant de bien distinguer les enjeux d'un design soigné et les constructions didactiques et pédagogiques (même si l'union des deux n'est pas incompatible)

Cette question nous ramène assez naturellement à une question de scénarisation des processus d'apprentissage en monde immersif. Ab initio, au moment de la conception il faut se poser la question de la place du design. Est ce que le degré de réalisme est corrélé à une plus value d'acquisition ?


Faut-il s'orienter vers des "Battlefield", des "Call of Duty", des "world of warcraft" pédagogiques ?


La réponse est loin d'être simple. Nous laisserons volontairement de côté le grand arbitre des décisions, le budget. Les grands majors des jeux investissent des sommes colossales pour imposer leurs jeux sur le marché mondial. Modern warfare 3 aurait nécessité un investissement de 100 millions de dollars (1). Il est évident que le marché de l'éducation n'a pas les caractéristiques de ce mass market.





Cela condamne t-il le monde virtuel comme à rester le parent pauvre de la simulation ? L'absence de design hyperéaliste le condamne t-il aux oubliettes du numérique pédagogique ?


Paysage de Minecraft (TM) - La mer
Il existe un exemple de jeu en ligne au graphisme très épuré qui séduit de nombreux joueurs. Le jeu en ligne Minecraft est un exemple de réussite qui ne se fonde pas sur un environnement graphique au degré de réalisme très important. 







A défaut de pouvoir apporter de réponses, je peux inscrire les questions qui se profilent en toile de fond de cette réflexion :

  • Quelle est la stratégie à adopter pour expliquer les articulations entre le type de design et les enjeux de formation ?
  • Quelle est la place du designer dans les dispositifs de conception ? Faut-il travailler avec un designer ? Peut-on se passer des conseils des designers ?
  • Tous les environnements peuvent-ils se passer d'une étape de réflexion sur le design ? 
Poser des questions, c'est souvent déjà donner un élément de réponse. Je pense que le designer à sa place dans le dispositif. ce qui signifie pas que son intervention doive se concrétiser par un livrable  hyperréalisme. L' épure à toute sa place.


Ce petit billet me permet de poser à nouveau la question du besoin de constituer des équipes pluridisciplinaires de conception pour construire les dispositifs de formation immersif. 

Le tuteur s'inscrira dans cette réflexion, selon les besoins de la formation, de la simulation le design aura son incidence. Prenons le cas de la simulation en médecine de catastrophe, la ville doit être métaphorisée (le besoin de réalisme n'est pas nécessaire), les lieux symbolisés. Les designers se sont parfois emparés de ces univers et ont initiés des projets très intéressants. Le projet "fenêtre sur chambre" est très intéressant à ce titre.

A l'inverse le monde virtuel peut être très réaliste. C'est la cas de e.factor, projet Belge pour la formation de techniciens. Dans ce cas il est nécessaire d'avoir un environnement représenté au plus proche de la réalité, la qualité du tutorat en dépend.

Un bon design au service du tutorat ? La question mérite certainement une analyse poussée.










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